top of page

NOTE DE GUERRE

Jules Henri COLLIOT
Poilu de Bois-le-Prêtre 1914-1915

Photo 4_Henri Colliot_edited.jpg
Site en cours de construction

Montargis - Dimanche 6 Septembre 1914  

 

Quoique le quartier soit consigné, je pars tranquillement faire une balade dans la forêt en bicyclette. En me dirigeant sur la carte, je passe par la chapelle Saint Sépulcre et Bois le Roi, contournant toute la forêt et ensuite la traversant dans toute sa longueur. C’est une ballade magnifique et je n’ai jamais été aussi tranquille.

Je rentre à Montargis à 10h30 et dans ma chambre trouve Richez qui tranquillement m’annonce qu’il faut que je monte mon sac en tenue de campagne car nous partons à 1h30 pour Toul. C’est une tuile, mais j’accepte le sourire sur les lèvres car il n’y a que cela à faire et puis je suis soldat pour servir à quelque chose.

 

A l’heure dite nous sommes prêts, les camarades ont tout fait pour nous être agréable: tarte, café, arrosé même avec du triple sec. Rassemblement des 24 sergents qui partent à la caserne Durzy, nous avons  tous des fleurs à nos fusils, à nos ceinturons et partout où nous pouvons en loger. Nous sommes brillants, mais le sac, la musette et la cartouchière sont terriblement lourds. 

Les Cies sont consignées, ce qui n’empêchent pas que tous les camarades présents nous accompagnent jusqu'à la gare. Aussitôt parti de la caserne, on nous enlève nos sacs et tout notre fourniment et nous sommes tellement pressés par la foule qui nous acclame que nous pouvons à peine avancer. Il fait une chaleur terrible.

A la gare, adieu touchant, le lieutenant nous embrasse de bon cœur ainsi que les sous officiers. Et nous montons dans le train.

Screen Shot 2023-02-28 at 11.28.21 AM.png

Aussitôt dans le train nous changeons de flanelle car nous sommes trempés et nous commençons l’inventaire des provisions que nous ont données les camarades. Poulet, boîtes de pâté et pain, vin, cigares, cigarettes et même un petit flacon de Pernod. Allons, nous ne mourrons pas de faim en route.

Arrivée à Sens à 6h, je cherche à voir mon oncle qui doit être parti car personne ne le connaît. Nous dînons sur l’herbe en attendant le train qui enfin arrive à 7h30. Wagon aménagé comme bien entendu, enfin comme nous avons de la place, nous nous étendons et nous ne sommes pas trop mal.

Arrivée à Troyes à 11h du soir, nous nous informons de l’heure du train qui doit nous emmener à Toul.

Personne ne peut nous renseigner et tout ce que l’on peut nous dire c’est que l’on nous préviendra aussitôt qu’il y aura un train pour nous.

Impossible de dormir tous dans la salle d’attente. Tous les bancs sont occupés par des malheureux émigrants qui dorment dans toutes les positions avec femmes et enfants.

 

Troyes - Lundi 7 Septembre 1914  

 

Vers 3h du matin arrive le train venant de la direction de Châlons où les armées Française et Allemande sont aux prises.

Dans le train il y a quelques blessés infanterie, tirailleurs et artilleurs.

 

Comme les infirmiers ne se pressent pas assez, nous les transportons nous mêmes jusqu'à l’infirmerie de la gare.

Nous causons avec eux, ils se sont battus à Montmirail, ensuite à Verdun et ensuite à  Châlons. Les Allemands sont, paraît-il, enfoncés et reculent de 30 Km en arrière. Espérons que cela soit vrai.

 

Au petit matin, le train ayant amené les blessés repart pour Chaumont. Nous en profitons et nous sautons sur le seul wagon de 1ere classe qui soit dans le train.

 

Arrivée à Chaumont  à 10 heures et départ pour Neufchâteau à 10h20. A Bologne la ligne est presque complètement obstruée par des wagons et des locomotives qui se sont rencontrés. Il n’y a heureusement que des blessés.

 

En passant à Rimancourt nous voyons le Château de Reynal qui me rappelle de bons souvenirs.

 

Arrivée à Neufchâteau vers 1 heure, nous trouvons toujours des émigrés et des blessés.

 

Départ à 1h20 et arrivée à Toul à 4 heures.

 

A la gare nous sommes attendus par un sergent qui nous emmène à la caserne Embourg en nous faisant traverser la ville.

 

Aussitôt arrivés, nous sommes classés dans nos nouvelles Cies, je suis versé à la 8 ème. Nous sommes passés en revue par le Capitaine et ensuite par le Colonel qui nous fait le petit sermon d’usage.

 

Le 2ème bataillon dont je fais partie se bat depuis la veille et comme l’on ne sait pas au juste où il se trouve, nous restons en attente dans la caserne.

Dîner dans la cour assis sur le bord du trottoir. Couchage sur paillasse, matelas et couvertures.

 

Toul - Mardi 8 Septembre 1914  

 

Réveil à 5 heures et ensuite nous nous apprêtons au départ. Je commence par décharger mon sac de tout ce qui n’est pas strictement indispensable et j’abandonne stoïquement le surplus. Ensuite je pars laver pour avoir tout mon linge propre.

 

Déjeuner assez mauvais, bouillon boeuf et pâté ce n’est pas épatant.

 

Vers 3hr alerte tout le monde en tenue de campagne. Nous croyons partir mais c’est une erreur, le Colonel seul partant retrouver le bataillon qui est engagé.

 

Je recommence à avoir des coliques, ce n’est pourtant pas le moment.

 

Toul - Mercredi 9 Septembre 1914  

 

Nous nous attendions à être réveillés dans la nuit mais rien. Je crois qu’ils vont nous oublier.

 

Je prévois d’aller prendre du bismuth, j’ai les jambes coupées par la colique.

 

Nous sommes en train de déjeuner lorsqu’un planton du Général Grent nous apprend que nous partons à 1h30. Sourires. Nous nous mettons en tenue et attendons.

 

Rien ne vient, il n'y a pas de contre ordre.

 

Nous nous couchons sur nos lits. Au dîner nous mangeons avec les rempilés qui nous traitent comme des dégoûtants qu’ils sont et nous flanquent à la porte du mess. Prise de biscuit et coucher.

 

Dans la nuit réveil par le canon qui tonne du côté de Nancy et qui s’arrête avant le jour.

 

Toul - Jeudi 10 Septembre 1914  

 

Toujours pas de lettres. Je commence à regretter Montargis. Pluie boue.

 

Les Allemands ont paraît-il bombardé Nancy sans grand résultat.

 

Dans la journée nous entendons toujours au loin les grosses pièces de siège dans la direction de Verdun. C’est, paraît-il, une nouvelle attaque du fort de Troyon qui a déjà subi 6 assauts et qui est à bout.

 

Toul - Vendredi 11 Septembre 1914  

 

Rien à faire. Pas de lettres. Exercices idiots dans l'après-midi.

 

Toul - Samedi 12 Septembre 1914  

 

Le matin descente à Toul sous prétexte d’achat de cartes d’états major. Ville morte, tout est fermé. Achat de tabac, allumettes, pâtés et fromage blancs. L’après-midi rien.

 

Toul - Dimanche 13 Septembre 1914  

 

Le matin revue en tenue de campagne par le Général Michaut commandant le secteur Est de Toul.

 

A midi, annonce de départ pour rejoindre le 2eme bataillon à Nancy.

 

Départ à 2h. Je suis chef de détachement et nous accompagnons un convoi de 4 voitures dont une de cartouches.

 

Nous passons  par Maron, longue côte, dîner à la maison forestière de Maron, départ dans la nuit, croisé un autre convoi à Villig les Nancy, traversée de Nancy et arrivée à la caserne St Essez à 11 h du soir vanné pas de lits.

 

Nancy - Lundi 14 Septembre 1914

 

Nous reconnaissons nos compagnies et faisons connaissance avec nos camarades qui nous racontent l’engagement de Champenoux auquel ils ont pris part le vendredi précédent. Dans cet engagement très chaud la 8eme Cie à laquelle je suis versé a perdu 161 hommes sur 240.

 

Les 3 officiers tués et 8 sergents sur 10 tués ou  blessés. Un caporal est retourné seul faire fonctionner la mitrailleuse du bataillon qui avait été abandonnée par le lieutenant. Il est fait Sergent. 

 

Dans la journée nous reformons 2 sections au lieu de 4 et nous commençons à rétablir l’équipement des hommes qui ont presque tout perdu. Nous avons enfin une chambre de sous off très chic.

 

Toul - Mardi 15 Septembre 1914 

 

Réveil brutal à 4h30 pour nous annoncer que la Cie partait à 5h 30 pour Toul.

 

Tenue de campagne. Départ par la pluie qui n’a presque pas cessé, traversée de Nancy, grande boue sur la route, sac très lourd, je manque d’entraînement.

 

Grande halte à Gondreville à 12h. Je fais cuire une côtelette à la broche sur une baguette. Un peu saignant mais elle me parait succulente quoique sans sel.

 

Je repars avec le campement que je ne retrouve pas.

 

Nous rentrons à 5h à la caserne Luxembourg.

 

Tout va bien quoique fatigué.

 

Pas de lettre depuis mon départ de Montargis.

 

Rosières - Mercredi 16 Septembre 1914   

 

Le matin, arrivée de renfort de Montargis pour compléter les Cies.

 

Nous retrouvons quelques amis et à 2 heures départ sous la pluie battante et dans la boue jusqu’aux chevilles.

 

Les nouveaux arrivés de Montargis trouvent le sentier un peu dur mais tiennent bon.

 

Arrivée à 7h30 à Rosière en Haye. Nuit noir. Pas de place toute la Cie …une grange. Préparation d’un café sous la pluie. Couchons dans la paille la capote mouillée.

 

Rosière - Jeudi 17 Septembre 1914  

 

Nous devions avoir réveil à 3h1/2. Contre ordre réveil à 6h. Préparation de la soupe dans la cour. Pluie, boue.

 

Soupe au riz excellente. L'après-midi tout le monde dort. Coup d’œil des curieux sous la grange. Obus allemand dans les maisons, dans les champs non éclatés.

 

Dormi l’après midi sur un coffre à lapin. Un peu dur. Dîner excellent soupe aux haricots, bœuf Vosgien. Couchée dans la grange, paille abondante. Un peu froid le matin. Tout va bien.

 

Rosières - Vendredi 18 Septembre 1914  

 

Réveil à 3h1/2 contremande à 6 heures.

 

Déjeuner bifteck haricots. A midi je reçois enfin une carte datée du 15 et adressée directement à Toul. C’est la première depuis que je suis parti de Montargis. Dîner et couché dans la paille à 8 heures.

 

Minorville - Samedi 19 Septembre 1914  

 

Départ à 4h30 sous pluies battantes, petite promenade de 15 Km toujours sous la pluie, littéralement gelée. Halte de 2h dans la boue à l’entrée d’un pays, jus bien chaud, Coucher sur la paille.

 

Mamey - Dimanche 20 Septembre 1914  

 

Départ précipité à 5h30 sans pouvoir prendre le jus. Marche sous la pluie. A 8h nous prenons position de combat en attente à la corne de la forêt de Puvenelle.

Les batteries françaises commencent le feu et nous restons en position d’attente sans manger (pas de ravitaillement) Il pleut et il fait froid. A 4h nous recevons l’ordre de partir en avant, le Colonel et le Chef de Bataillon sont affolés.

 

Déploiement en arrière d’une première crête et nous partons. Nous laissons Mamey à notre gauche et arrivons vers 6 h dans un vallon où nous recevons enfin le baptême du feu  sous la forme d’une douzaine d’obus allemands qui éclatent un peu en avant de la section. Le lieutenant venant de me nommer chef de section,  je prends immédiatement les dispositions nécessaires, (en écaille, en tortue) carapace et je regarde, beaucoup plus curieux que effrayé, les éclatements des obus, qui du reste ne nous font aucun mal. 

Quelques minutes après, une fusillade intense éclate en avant, un de mes hommes a peur et prend la fuite. Je fais le geste de tirer mais j’ai un remords de conscience et je n’exécute pas, c’était pourtant mon devoir.

Cette fusillades n’est du reste pas dirigée sur nous et nous entendons siffler que quelques balles perdues. Nous restons étendus dans la boue, la nuit tombante et nous gelons sur place. Je me promène d’une section à l’autre pour avoir des ordres qui sont de rester sur place. Avec de la paille pourrie nous nous fabriquons un lit peu confortable et nous trouvons moyen de sommeiller. Le froid aux pieds me réveille, je me déchausse pour mettre une deuxième paire de chaussettes et en profite pour me déshabiller et mettre une ceinture de flanelle que j’ai bien l’intention de ne plus quitter. Vers minuit nous recevons l’ordre de nous replier et dans la nuit noire comme un four nous partons, glissant, trébuchant et  tombant à qui mieux mieux. Nous reprenons une position d’attente et nous nous recouchons dans la boue sous le vent glacial.

Mamey - Lundi 21 Septembre 1914

Nous reprenons exactement la première position que nous occupions. Nous n’avons rien touché la veille et il n’y a plus rien à manger. Je grignote des biscuits. Vers 8 heures nous avons l’autorisation de faire du feu pour nous faire un jus coupé d’eau, singe chauffé et enfin le jus arrive juste au moment ou l’ordre arrive d’éteindre les feux. Une heure après, une rafale d’obus balaye le bois ou nous nous trouvons, nous l’abandonnons précipitamment et reprenons le vallon où nous recevons presque de suite, l’ordre de prendre position de réserve en arrière d’une crête. Il pleut toujours, après quelques allées et venues ma section est désignée comme soutien d’artillerie d’une batterie qui vient de se déployer pour soutenir la retraite des forces françaises qui se replient. Le 167 et 168 ont paraît-il de

 grosses pertes.

​​

Je reçois l’ordre de tenir jusqu’au bout. Des villages brûlent en avant et éclairent la forêt car la nuit tombe. L’artillerie se replie et je rejoins la Cie qui va prendre grande garde dans la ferme de Nanzėville, orage épouvantable. Traversé des lacs de boue.

Nous nous perdons et mettons  une heure à faire 1 km. Réflecteur du dirigeable. Reconnaissance de la ferme dévastée. Effet cataves. Formation en grand garde (avant-poste) et petit poste. J’ai dormi en tout 1 heure sur la planche.

Ferme de Nanzéville - Mardi 22 Septembre 1914  

Réveil brutal à 4 heures par un coup de fusil, sac au dos fusil aux pieds, je me précipite à la porte pour recevoir Périer le 1er blessé qui a le petit doigt emporté. Il nous dit avoir vu dans un petit bois une patrouille allemande. Nous prenons position de défense et attendons avec impatience le lever du jour et une attaque qui doit être dangereuse étant donnée notre mauvaise position.

Rien ne vient. Au jour nous fouillons le bois. Rien nous nous mettons à la ferme en état de défense. J’ai toujours mes souliers mouillés. Nous avons au réveil du vin chaud avec un morceau de lard, un vrai régal.
 

Vers 1h rassemblement de la Cie et nous repartons attaquer Mamey pour la 3ème fois. 

 

Fatigue. A chaque arrêt je m’endors. Déploiement 1ère ligne. Pluie d’obus 1 sera blessée. Fusillade, mitrailleuses et enfin arrivée à la crête sans tirer un coup de fusil. La horde se replie en désordre ce qui nous force à reculer. Je reforme la section et la replie en bon ordre à 50 m en arrière. Contre ordre, je ramène la section à la crête. Tout le  monde marche, c'est dur. Nous restons ici 1⁄2 heure sur place et nous nous replions en bon ordre par ligne de ½ section par 2.

 

Superbe assistance d’un St Syrien. Replie dans le vallon et position d’attente démoralisante de 3 heures dans la nuit et sous la pluie. Nous commençons seulement à trembler. Enfin nous rentrons à Martincourt. Cantonnement d’alerte. Feu pour se sécher et sommeil de 12h à 4h.

 

Martincourt - Mercredi 23 Septembre 1914  

 

Réveil à coups de canons le 23 septembre, malgré cela nous buvons le café et faisons cuire la soupe. Distribution de vivres de réserve et disposition de combat. Je prends ces notes assis sur mon sac. 

 

Le canon tonne. Il fait enfin un beau soleil. Les Allemands bombardent Martincourt.

Vers 5h1/2 nous allons reconnaître les positions et à la nuit nous prenons les avants postes au contact.

Nous passons la nuit allongé par terre en ligne, baïonnette au canon. Très froid. Pour dîner, une tranche de lard cru. C’est maigre. Il y a des blessés dans la nuit.

 

Martincourt - Jeudi 24 Septembre 1914 

 

Réveille au jour, nous sommes gelés. Café qui vient de Martincourt est froid. Construction de tranchées sur le plateau. Déjeuner sur le terrain soupe aux légumes excellente; il y avait vraiment longtemps que je n’avais mangé de légumes et je commence à avoir assez du singe et du lard. Beau soleil mais vent froid. Journée calme, rares coups de canons et de fusils. Relevés à la nuit et rentrés à Martincourt. Cantonnement d’alerte. Je couche sur un sommier maison Labantoissie.

 

Martincourt - Vendredi 25 Septembre 1914

 

Lever 4h, jus, lave mes mains. Prise de position en avant de Martincourt. 

 

Vers 12h arrive la nouvelle que nous allons attaquer et quelques temps après, distribution de boucliers portatifs car nous sommes en 1ère ligne. Léger frisson. Dégradation par outre. A 2h départ. Progression très lente jusqu'à Mamey qui est abandonné. Casseroles et

matériel allemand. 

 

Nous continuons en avant jusqu'à la route de Pont à Mousson. Attente de reconnaissance dans la nuit. Retour en arrière et coucher à la belle étoile. Froid.

 

Martincourt - Samedi 26 Septembre 1914 

 

En avant vers Mamey.

Froid, manger bœuf, café, gras de bœuf chaud et bouillon. Rhum.

A 9h prise de position et à 11h début d’attaque  direction Fey en Haye. Nous avançons de 100 m et ensuite restons sur place jusqu'à la nuit. Duel féroce d’artillerie. À la nuit nous partons en avant et marchons jusqu'à 2h du matin pour prendre position à 300m des Allemands. 

 

Couchés sur la terre, forte risée, froid.

 

Fey en Haye - Dimanche 27 Septembre 1914  

 

Dès le jour, construction de tranchées et ½ heure après nous recevons les premiers obus. Nous nous déplaçons de l’axe de tir et formons la carapace.

Vers 8 heures nous recevons l’ordre de nous porter en avant et d’occuper une crête très dangereuse. Marche  pénible en avant et infiltration.

Au bout d’un quart d’heure nous recevons des obus et bientôt une véritable pluie de percutants. Lieutenant tué et 38 hommes hors de combat. Obligé de reculer sous pluie d’obus. Bon ordre. Pas de perte à ma section, Sergent Maillefert blessé. Retrait, prise de petits postes et rentrée à Mamey a 4h. Nombreux carnages dans le bois. Nous touchons du pain et du bœuf car nous n'avons rien touché depuis la veille au matin. Le café est resté sous la pluie d’obus. Position de bivouac à côté de Mamey. 4 hommes tués et 33 blessés à la Cie sans tirer un coup de fusil.

 

Mamey - Lundi 28 Septembre 1914 

 

Nuit froide. 

Départ en avant et construction de tranchées renforcées. Journée tranquille à part quelques douzaines d’obus qui ne nous font aucun mal.

 

Mamey - Mardi 29 Septembre 1914 

 

Nuit passée dans la tranchée construite la veille. Abris en branches et paille, position très mal commode.

 

Reconstruction et renforcement de la tranchée. Richez adjudant.

 

Mamey - Mercredi 30 Septembre 1914  

 

Même situation. Beau temps. Quelques obus. 

A 6 heures départ et marche de nuit pour prise de position en avant  à gauche de Fey en Haye. Construction d’abris toute la nuit.

 

Fey en Haye - Jeudi 1er Octobre 1914 

 

Continuation de la construction des tranchées à hauteur de Fey en Haye. Je me débarbouille pour la 1ère fois depuis Rosière.

Arrivée de l’adjudant Krentzeneye qui prend le commandement de la 1ere section.

Passée la nuit dans les tranchées, abris assez bien pas froid.

 

Fey en Haye - Vendredi 2 Octobre 1914

 

Position d’attente. Quelques obus

 

Fey en Haye - Samedi 3 Octobre 1914

 

Rien de nouveau.

 

Fey en Haye - Dimanche 4 Octobre 1914

 

Rien de nouveau.

 

Fey en Haye - Lundi 5 Octobre 1914

 

Je suis de jour, quelques obus.

Fey en Haye - Mardi 6 Octobre 1914

Bombardement intense de nos tranchées par les Allemands. 1 tuée 2 blessés Passé la nuit à faire des tranchées. Très froid.

Fey en Haye - Mercredi 7 Octobre 1914

Le matin repos. A midi départ en reconnaissance sur le village de Regnieville en Haye. Traversées du bois. Bute petit poste, sentinelle tombe. Je suis de patrouille 3 hommes. Parcours très dangereux 800m  de ravin découvert sous l’œil des sentinelles allemandes. Adieu et parcourus très vite. Arrivée sur la crête à 200 m des tranchées allemandes occupées. Non vus. Reconnaissance de Regnieville de R…..

Groupe d’Allemands. Raisonne coups de canon. Emotion. Impatience du Colonel. Souper de bons appétit haricots. 

 

Fey en Haye - Jeudi 8 Octobre 1914

Nuit tranquille, le froid augmente, tranchée dans les bois.

 

Fey en Haye - Vendredi 9 Octobre 1914

Nuit de veille aux avant postes. Faction dans les arbres. Nous nous replions en 2eme ligne bois de …

 

Fey en Haye - Samedi 10 Octobre 1914

Repos en ligne quelques obus. Reçu chaussettes.

 

Fey en Haye - Dimanche 11 Octobre 1914

Matinée tranquille dans le bois. Douleurs dans les pieds. L'après-midi nous revenons à Mamey. Sac lourd. Dîner frites. Coucher dans une grange.

 

Mamey - Lundi 12 Octobre 1914

 

Séjour à Mamey. Déjeuner pommes au lard. Dîner superbe Potage concentré salade de homard bifteck pommes soufflées café mirabelle. Nous nous couchons à 10h du soir dans une maison qui n’a ni portes ni carreaux. Beau temps.

 

Mamey - Mardi 13 Octobre 1914

 

Reçu gants et provisions. Déjeuner avec conserve pieds de bœuf et pommes de terre.

Départ de Mamey et reprise des positions.

 

1ere ligne contre le bois dit « le brûle ».

 

L'après-midi reconnaissance de la côte 330 pour emplacement petits postes. Retour sous pluie d’obus. Capitaine Wilmet blessée.

 

Départ à 6h30 pour prendre poste écarté à la cote 330 avec 3 hommes. Appréhension.

 

Boisel pour 2ème poste. Réunion de 2 postes pour la nuit. Hallucination. Nuit calme à 200m des Allemands.

Retour à 9 h du matin.

Mamey - Mercredi 14 Octobre 1914  

Essai de repos dans la journée. Quelques obus.

Bonne nuit.

 

Mamey - Jeudi 15 Octobre 1914  

 

Journée calme. Fusillade dans la nuit.

1 heure pour rassembler la section de piquet, fureur du Lieutenant qui veut faire rétrograder Labarre.

 

Mamey - Vendredi 16 Octobre 1914  

 

Au réveil, de garde dans la tranchée jusqu'à midi. Après-midi calme. Gruyère.

 

Mamey - Samedi 17 Octobre 1914

 

Retournons dans les abris. Le soir, la nuit, retour à Mamey. Nuit noir. Boisset oublié en petit poste.

 

Mamey - Dimanche 18 Octobre 1914  

 

Retour de Boisset à 9h le soir, je suis nommé directeur des  postes.

 

Mamey - Lundi 19 Octobre 1914  

 

A Dieulouard en vélo pour pompes. Provision de bouche au retour. Bon déjeuner et bon dîner.

 

Mamey - Mardi 20 Octobre 1914

Réparation de pompes. Dîner pigeons et très joyeux. Départ à 1heure du matin pour l’attaque du bois de Mort Mare. Marche la nuit dans la boue. 5 heures sac au dos. Bombardements français et allemand. Terrible attaque à la baïonnette dans la nuit. Nous avançons un peu sans pouvoir pénétrer dans le bois.

 

Bois Mort Mare - Mercredi 21 Octobre 1914 

Construction de tranchées en avant du Mort Mart sous obus ennemis. A la nuit reconnaissance de tranchées sur la crête. Je ramène un blessé. A 11 heure du soir, ordre de se porter en avant pour notre section sous pluie d’obus et de balles. Attitude de l’adjudant «Coup de crosses» et construction de tranchées.

6 blessés, gamelle bosselée et obus sur couverture. Petit poste 4 hommes jusqu'au. 1 homme au conseil de guerre.

 

Bois Mort Mare - Jeudi 22 Octobre 1914

Relève au jour et repos dans la tranchée sous obus. Bristel blessé. Éveil démantelé. Clocher. Départ à la nuit des tranchées. Rentrée à Mamey.

 

Mamey - Vendredi 23 Octobre 1914

Distribution de linge magnifique.

Confirmation de réparations de pompes.

 

Mamey - Samedi 24 Octobre 1914

Réparation de pompes à Mamey.

Déjeuner et dîner à la cuisine.

 

Mamey - Dimanche 25 Octobre 1914

Suite de la réparation des pompes. Sommier lit de plume et édredon.

 

Mamey - Lundi 26 Octobre 1914

Suite de pompes.

 

Mamey - Mardi 27 Octobre 1914

Suite de pompes Bombardement de Mamey.

 

Mamey - Mercredi 28 Octobre 1914

Suite de pompe. Bombardement journalier.

 

Mamey - Jeudi 29 Octobre 1914

 

Déjeuner chocolat au lait condensé. Suite des pompes à 2 heures départ de la Cie pour attaque du bois Le Prêtre en avant de Montauville près de Pont à Mousson. 

 

Action grave dans laquelle la 168eme  avance de 2 Km. Je reste à Mamey. Transport de la soupe à la Cie et ravitaillement. Je n’ai plus de souliers.

 

Mamey - Vendredi 30 Octobre 1914

Suite des pompes et puis ravitaillement de la Cie  en 1ere ligne. Blessure de Cordet soignant un blessé allemand. Obus dans Mamey. Colonel.

 

Mamey - Samedi 31 Octobre 1914

Suite. Les cuisiniers partent à Montauville, L’équipe de pompiers est versée au subsistance à la H.R.

 

Mamey - Dimanche 1 Novembre 1914

 

Toussaint. Suite des pompes. Beau soleil. Je m’ennuie.

 

Mamey - Lundi 2 Novembre 1914

 

Désinfection de puits. 16 sacs de colis. La Cie à l’attaque du bois Le Prêtre. Mort des Lieutenants Charvin et Ossude.

 

Mamey - Mardi 3 Novembre 1914

 

Désinfection cave. Colonel. Bataille sur les hauts de Meuse. Éclair d’obus.

 

Mercredi 4 Novembre 1914

Construction d’égout. Désinfection de puit suite de l’attaque de bois Le Prêtre. Lutte d’artillerie et d’infanterie.

 

Jeudi 5 Novembre 1914 

Rien de nouveau.

 

Vendredi 6 Novembre 1914 

 

Dito.

 

Samedi 7 Novembre 1914 

Dito.


 

Dimanche 8 Novembre 1914 

Dito retour de la Cie....

 

Lundi 9 Novembre 1914 

 

Je rentre à la Cie......

 

Mardi 10 Novembre 1914 

Départ pour les tranchées en avant de Fey. Brouillard froid

 

Mercredi 11 Novembre 1914 

Aux tranchées Obus

 

Jeudi 12 Novembre 1914 

Aux tranchées

Vendredi 13 Novembre 1914 

Aux tranchées Obus

 

Samedi 14 Novembre 1914 

Aux tranchées Obus. Mort de Jonquet tué par un obus.

 

Dimanche 15 Novembre 1914

 

Aux tranchées. Bombardement Allemand, abris inondés pendant la nuit.

 

Lundi 16 Novembre 1914 

 

Retour à Mamey sous la pluie. L’après midi dans la forêt de Pivenelle aux pieux. Arrivée des bleus de Montargis.

 

Mardi 17 Novembre 1914 

 

À Mamey au repos.

 

Mercredi 18 Novembre 1914 

Retour aux tranchées en 1ere ligne.

 

Jeudi 19 Novembre 1914

 

Aux tranchées.

 

Patrouille près des tranchées Boche pour protéger la corvée de morts. Très froid.

Vendredi 20 Novembre 1914

 

Aux tranchées 2eme patrouille. Ramené 3 morts.

 

Samedi 21 Novembre 1914

 

Retour à Mamey 15 jours à la chambre.

 

Dimanche 22 Novembre 1914

 

À Mamey. Corvée de piquets.

 

Lundi 23 Novembre 1914

 

Aux tranchées. 

3ème patrouille. Fusillade. Ma pauvre Colotte qui me dit qu’elle me sent près du feu. Je te crois. Perdu dans la nuit aux retours.

 

Mardi 24 Novembre 1914  

 

Aux tranchées.

Mercredi 25 Novembre 1914  

 

Aux tranchées. Cris dans la nuit, patrouille aux premières lignes dans la neige.

 

Jeudi 26 Novembre 1914

 

Rentre à Mamey. 

Malade Repos à la chambre avec Rose.

 

Vendredi 27 Novembre 1914 

 

À Mamey. Repos.

 

Samedi 28 Novembre 1914

 

Aux tranchées. Obus.

 

Dimanche 29 Novembre 1914

 

Aux tranchées. De jour resté à Mamey pour lettres.

 

Lundi 30 Novembre 1914

 

Aux tranchées. Obus à 10m de la tranchée.

 

Mardi 1 Décembre 1914

 

Aux tranchées.

 

Mercredi 2 Décembre 1914  

 

À Mamey. 

Corvée de lavage à Martincourt. Demande de rétrogradation.

 

Jeudi 3 Décembre 1914 À Mamey 

 

Rapport du Colonel et convocation avec Lt. Blanchet.

 

Vendredi 4 Décembre 1914

 

Retour aux tranchées le long de la route de Thiancourt.

 

Samedi 5 Décembre 1914

 

Je passe à la 2eme Cie à Nancy. Réception très cordiale.

 

Dimanche 6 Décembre 1914

 

En réserve. Pluie. Épuisement d’eau dans l’abri.

 

Lundi 7 Décembre 1914

 

En 1ere ligne.

 

Abri avec le Lt. Lebel. Jeu Carte.

 

Mardi 8 Décembre 1914

 

En 1ere ligne. Pluie.

 

Mercredi 9 Décembre 1914

 

Dito.

 

Jeudi 10 Décembre 1914  

 

À Mamey. Fièvre typhoïde.

 

Vendredi 11 Décembre 1914  

 

À Mamey

Planton aux feuillées. Bombardement furieux du Mont Mart.

 

Dimanche 13 Décembre 1914

 

En 1ere ligne. 

Bombardement du Mont Mart et de nos tranchées. Abris traversés par la pluie.

 

Lundi 14 Décembre 1914

 

En 1ere ligne. 

Bombardement du Mont Mart. À la nuit attaque du bois Le Prêtre. Alerte sous la pluie. Dans la tranchée, obus éclairants et obus et mitraille.

 

Mardi 15 Décembre 1914

 

En 1er ligne 

 

Bombardement de Mont Mart.

 

Mercredi 16 Décembre 1914

 

En 1ere ligne 

Construction de tranchées. Coupe et plans de tranchées.

 

Jeudi 17 Décembre 1914

 

En soutien. Abri du Capitaine.

 

Vendredi 18 Décembre 1914

 

En soutien. Obus du Capitaine Tusant sur groupe de travailleur commandé par moi. Un homme blessé à 2 m de moi. Je le panse et les infirmiers l’emportent.


 

Samedi 19 Décembre 1914

 

À Mamey au repos, bain.

 

Dimanche 20 Décembre 1914

 

À Mamey, pluie construction de trou de loups.
 

Lundi 21 Décembre 1914

 

En 1ere ligne 

Pluie. Couverture d’abris en fibrociment. Bombardement.

 

Mardi 22 Décembre 1914

 

En 1ere ligne 

Couverture. Bombardement de la réserve par obus de 165.

 

Mercredi 23 Décembre 1914

 

En 1ere ligne.

 

Jeudi 24 Décembre 1914

 

En 1ere ligne 

Neige. Réveillon. Boudin et poêlée de marrons.

 

Vendredi 25 Décembre 1914

 

En réserve au bois Le Prêtre. Liaison avec le 168. Boyaux tranchées abris bouclier de rempart, sape à 15 m des tranchées des Boches. Œufs au jambon.

 

Samedi 26 Décembre 1914

 

En réserve. Gelé. Bûcheron dans la forêt.

 

Dimanche 27 Décembre 1914

 

À Mamey. Bain.

 

Lundi 28 Décembre 1914

 

De garde à Mamey.

 

Mardi 29 Décembre 1914

 

Relève de garde à  6h et départ en 1ere ligne. Changement d’itinéraire pour éviter arrosage Boche. Travail à la sape allant vers Fey. Bombardement allemand et coup de fusil sur moi. Les Boches sont vraiment maladroits.

 

La nuit, nouveau bombardement. Un homme blessé à la tête par éclat d'obus.

 

Mercredi 30 Décembre 1914

Travaille à la sape. Obus. Repérage de batterie à gauche du bois de la Râpe.

 

Jeudi 31 Décembre 1914

 

Travaille à la sape. Bombardement Boche. Un homme blessé. Dans la nuit vers 11h ½ vive fusillade. Alerte. Tout le monde dans la tranchée sous la pluie. 1er Janvier Boche. Nous jouons aux cartes et soupons. Maquereaux marinés et homard. Je suis crotté jusqu’aux genoux sans exagération.

 

Vendredi 1 Janvier 1915

 

Nous nous souhaitons une bonne année à Mamey en revenant de la tranchée. Très cordial. Réveil à 7 heures. Chocolat au lait. Allocution du capitaine. Compliment au Lieutenant Labere promu. Déjeuner. Marennes avec Haut Sauternes. Jambon et beurre. Camembert avec Bordeaux rouge. Confiture. Café et cigare. Après tout le monde ronfle.

 

Samedi 2 Janvier 1915

 

Nous redescendons en réserve. Continuation des fêtes. Pluie boue épouvantable. Abri traversé Rimailho de 155.

 

Dimanche 3 Janvier 1915 

 

En réserve. Une patrouille rapporte le cadavre de Rayard Aimée tué le 21 sept. Reconnaissance dans la nuit. Mise en terre.

 

Lundi 4 Janvier 1915 

 

À Mamey. Bain.

 

Mardi 5 Janvier 1915 

 

À Mamey.  De jour. Je trotte en sabots toute la journée. Boue.

 

Mercredi 6 Janvier 1915 

 

En 1ere ligne Travaux.

 

Jeudi 7 Janvier 1915 

 

En 1ere ligne. 

Travaux et relevés topographiques de boyaux et tranchées de la 2eme Compagnie. 166 m de combat et 144 m de boyaux. Inondation.

 

Vendredi 8 Janvier 1915 

 

En 1ere ligne. 

Vers 9 heure alerte tout le monde dans la tranchée. Ordre d’attaque. En attente, bombardement français très violent et riposte allemande. Pas de perte. 

Samedi 9 Janvier 1915 

En 1ere ligne. 

Bombardement Pluie et inondations.

 

Dimanche 10 Janvier 1915

 

En réserve. Nous organisons un concert à la 14ème Cie avec comme basse grondante un bombardement sur les Hauts de Meuse.

 

Lundi 11 Janvier 1915 

 

En réserve. Pluie. Boue  inondation. Concert.

 

Mardi 12 Janvier 1915 

 

En réserve dans le bois Le Prêtre. Bombardement. Bûcheron et scieur de long.

 

Mercredi 13 Janvier 1915 

 

En réserve.

 

Jeudi 14 Janvier 1915

 

Nous remontons en 1ere ligne pour réparer les abris. Visite et démolition des abris de la 1ere Cie.

 

Vendredi 15 Janvier 1915 

 

En 1ere ligne. 

A 4 heures exercice d’alerte. Construction d’observatoire.

 

Samedi 16 Janvier 1915 

 

En 1ere ligne. 

Suite de l’observatoire. Bombardement. Toujours de la pluie. Travail de nuit à l’observatoire par pluie torrentielle et glacée.

 

Dimanche 17 Janvier 1915

 

Des le petit jour je finis l’observatoire que les artilleurs viennent aussitôt occuper. Dès 7 heures, attaque au bois Le Prêtre. Bombardement et réplique Boche. Nous progressons. Tout le monde en tenue en prévision de contre attaque qui se produit par l’artillerie. Un homme tué par une boîte à mitraille. Prisonniers Boches 103.
 

Lundi 18 Janvier 1915

 

Travaux à l’observatoire et aux tranchées de flanquement. Bombardements intensifs. 3 alertes de jour. 1 alerte de nuit.

 

Mardi 19 Janvier 1915

 

De jour travaux dito. Bombardement de nos tranchées par grosses pièces Boche. Un obus à 1 m de l’observatoire. L’observateur fait la pirouette. Abris à reconstruire. Personne de touché.

Je vais aux lettres à 5h et je retourne seul dans la nuit, dans la neige avec la lune à ½ voilée. Sinistre. 

Vive fusillade et canonnade dans le bois Le Prêtre ou nous attaquons. Mines Rimailhos. Hurlements et bruits de charge à la baïonnette. A la Cie je trouve tout le monde en alerte.

De 6 à 9, 3 alertes consécutives. Nous boulottons dans la tranchée. Nuit assez calme. Effet terrible des mines et du Rimailho. Corps déchiquetés. Capitaine Boche en morceaux dans un arbre. Nous progressons malgré 2 graves contre attaques.

 

Mercredi 20 Janvier 1915

 

Matinée calme à 3h contre attaque Boche précédée de bombardements Kolossal par les Frisons. Toujours en alerte.

 

Jeudi 21 Janvier 1915

 

Nouvelle attaque dans la nuit dans le bois Le Prêtre.

 

Vendredi 22 Janvier 1915

Bombardement sur le bois Le Prêtre et attaque à la tombée de la nuit. Alerte.

 

Dimanche 24 Janvier 1915

Nous descendons en 2eme ligne dans le bois Le Prêtre et commençons à nous approvisionner. Neige.

 

Lundi 25 Janvier 1915

 

En 2eme ligne 

Alerte. Bataille à coups de boules de neige.

 

Mardi 26 Janvier 1915

 

En 2eme ligne Repas fumeux.

 

Mercredi 27 Janvier 1915

 

Promenade à Montauville.

 

Jeudi 28 Janvier 1915

 

À Mamey. Douches et construction de tentes dans la grange. Les hommes gèlent. Promenade sur un chemin gelée pour avoir du bois.

 

Vendredi 29 Janvier 1915

 

À Mamey. 

Vaccination contre la typhoïde. Un obus dans les feuillées.

 

Samedi 30 Janvier 1915

 

Après la vaccination, fièvre, courbatures,  insomnie.

 

Dimanche 31 Janvier 1915

 

À Mamey Cela va mieux.

 

Lundi 1 Février 1915

 

Nous remontons aux tranchées et nous sommes de suite arrosés. Casquette sur la tranchée.

 

Mardi 2 Février 1915

 

Suite des travaux de casquette. Brouillard. Pluie d’obus. 1 blessé léger.

 

Mercredi 3 Février 1915

 

Suite des travaux par temps de brouillard. L’après midi nous sommes bombardés par 3 batteries boches sans résultat. Dégel et inondations.

 

Jeudi 4 Février 1915

Nous reconstruisons les boyaux qui s’effondrent par suite du dégel.

 

Vendredi 5 Février 1915

 

Retour à Mamey. 

L’après midi corvée de piquets à Puvenelle. Beau soleil. Pose sur hamac de branches.

 

Samedi 6 Février 1915.

 

Vaccination 2eme fois.

 

Dimanche 7 Février 1915

 

Repos après vaccination. Je fais des œufs à la neige. Bombardement du pays dans la nuit. La  maison tombe. Je me rendors.

 

Lundi 8 Février 1915

 

Affaire Guiot.

 

Mardi 9 Février 1915

 

Nous remontons en 1ere ligne pour recevoir quelques bordées d’obus. Mais nous répondons par du tir direct par rafale.

 

Mercredi 10 Février 1915

 

Pluie tout s’écroule. Patrouille de nuit vers Fey. Nuit noire. Fusées.

 

Jeudi 11 Février 1915

 

En 1ere ligne. Casquette.

 

Samedi 13 Février 1915

 

Retour à Mamey. 

Installation de toiles de tentes dans la grange. Revue d’arme.

 

Dimanche 14 Février 1915

Réparation couverture, Vaccination.

 

Lundi 15 Février 1915

 

De jour à Mamey.

 

Mardi 16 Février 1915  

 

Alerte vers 11 h. tout le monde en tenue prêt au départ. Bombardement  sur Mort Mare.

 

Mercredi 17 Février 1915

 

Retour en 1 ère ligne. Travaux.

 

Vendredi 18 Février  1915

 

Bombardement terrible sur Verdun.

 

Vendredi 19 Février 1915  

 

Suite de bataille sur Verdun. Avion Boche descendu à Dieulouard.

 

Samedi 20 Février 1915 

 

Bataille sur Verdun.

 

Dimanche 21 Février 1915

 

Retour à Mamey. Douches. Attaque sur Bois le Prêtre.

Reprise du signal de Yon.


 

Lundi 22 Février  1915  

 

Toute la journée en alerte pour attaquer sur Bois le Prêtre.

 

Mardi 23 Février 1915

 

Retour brutal aux tranchées pour remplacer le 2ème Bataillon qui part à Montauville et Bois le Prêtre. Tempête de neige. Nuit épatante sous un tout petit gourbi avec Urbain. 
 

Mercredi 24 Février 1915

 

Quelques obus. Nous rebouchons les boyaux  et abris effondrés. Serais ce le commencement de la fin.

 

Jeudi 25 Février 1915

 

Nous remontons aux tranchées de 1 ère ligne. Travaux Patrouille vers Fey par clair de lune splendide. Reconnaissance à la jumelle.

 

Vendredi 26 Février 1915

 

En 1ere ligne. Obus. Nous commençons un abri d’artillerie.

 

Dimanche 28 Février 1915

 

En 1ere ligne.

 

Bombardement. 3 obus sur la casquette. Jacob saigne du nez et Courtin à une bosse par un obus.

 

Lundi 1 Mars 1915

 

Bombardement, un obus sur la tranchée retourne Urbain comme une crêpe. Il y a la ligne tachée de pierraille et grains de poudre.

 

Mardi 2 Mars 1915

 

En 1er ligne. Bombardement très dense. Je répare la casquette.

 

Mercredi 3 Mars 1915

 

En creusant l’abri des observateurs, je me montre un peu trop et les Boches veulent prendre ma tête comme carton. Ils me ratent comme bien entendu.

 

Jeudi 4 Mars 1915

 

Retour au patelin, je retrouve Urbain qui est bien portant quoique gelé. Tympan crevé. Douche.

 

Vendredi 5 Mars 1915

 

Nous dégustons des huîtres et je prends la garde à l’Auberge Mave. Attaque de nuit des Boches sur  le bois Le Prêtre. Repoussée avec perte et fracas.

 

Samedi 6 Mars 1915

 

Travaux de campagne au patelin. Il pleut. Boue pour ne pas changer.

 

Dimanche 7 Mars 1915

 

Travaux de campagne dito.

 

Lundi 8 Mars 1915

 

Retour aux tranchées Il y a dans la nuit une attaque vite repoussée.

 

Mardi 9 Mars 1915

 

Un obus entre par un créneau entre Manseca et moi. Nous ramassons la fusée pour faire des bagues en souvenir.

 

Mercredi 10 Mars 1915

 

Toujours aux tranchées. Un poilu de la 3eme Cie se suicide. Mauvais signe. Étant sur le talus de la mitraillette, un obus arrivant dans l’abri de la 16eme me fait descendre en vitesse.

 

Jeudi 11 Mars 1915

 

Suite de l’abri des artilleurs. Bombardement moyen. Attaque sur le bois Le Prêtre. Patrouille dans la neige.

 

Vendredi 12 Mars 1915

 

Gabarit de tranchée à faire. La nuit suivante Lepiner a ses 2  pantalons et son caleçon traversées sans une égratignure. En sautant dans le boyau, Cault me flanque sa pioche dans la figure. A 6h1/2 du soir nous partons faire et construire une tranchée à 300 m en avant de notre 1ère ligne et nous travaillons jusqu'à 5h  ½ du matin malgré une vive attaque qui se produit sur notre droite et qui nous arrête une 1/2h et quelques obus formant étoiles filantes. J’ai une indigestion de sacs de terre et en rentrant je perds mon porte monnaie.

Samedi 13 Mars 1915

 

Nous redescendons au pays absolument crevé. Je m’allonge et dors toute la matinée. Création du mess des sous off.

 

Dimanche 14 Mars 1915

 

Toute la journée en alerte car notre tranchée nouvelle est terriblement bombardée. Elle reçoit 130 obus.

La 4 eme Cie s’y maintient cependant et la renforce. Le soir nous mettons sac au dos et nous repartons renforcer la 4ème. Boyaux …

 

Lundi 15 Mars 1915

 

Repos à Mamey.

 

Mardi 16 Mars 1915

 

À Mamey. Revu. Nous remontons aux tranchées à 6h du soir. Garde dans tranchée de 1ère ligne sous les obus pendant attaque violente dans le bois Le Prêtre.

 

Mercredi 17 Mars 1915

 

Repos le matin et aménagement de la tranchée de 1ère ligne. Obus. Travaux de nuit pour construction de sape et nouvelle tranchée sous feu Boches. 2 Hommes tués, 1 sergent et 1 caporal blessés. (Remond Possoli).

 

Jeudi 18 Mars 1915

 

Suite des travaux à la tranchée de 1ère ligne. De garde dans cette tranchée de 18h a 24 h. Nuit noire et pluie. Souper à 1h du matin.

 

Vendredi 19 Mars 1915

 

Repos. J’en ai besoin.

 

Samedi 20 Mars 1915

 

Aménagement de la tranchée casquette créneau périscope etc. Étant avec le Capitaine et le Lieutenant nous envoyons quelques coups de fusil dans le créneau de Fey. Ils nous répondent par 5 Obus. Quels butors.

Dimanche 21 Mars 1915

 

À Mamey Repos sous bombardement par nos pièces. Dégâts.

 

Lundi 22 Mars 1915

 

Corvée de lavage à Saint Jean et retour football.

 

Mardi 23 Mars 1915

 

Corvée de salubrité.

 

Mercredi 24 Mars 1915

 

Revue par Intendant et garde au calvaire. Pluie battante et froid.

 

Jeudi 25 Mars 1915

 

De garde toute la journée. Arrestation d’un espion qui n’en était pas un.

 

Vendredi 26 Mars 1915

 

À Mamey.

 

Samedi 27 Mars 1915

 

Retour aux tranchées.

 

Vendredi 2 Avril 1915

 

Je n’ai rien pu noter depuis le 27 Mars et cependant ils c’est passé pas mal d’événements. 

D’abord renforcé par le 29ème nous avons construit une sape contournant Fey et avons pris la garde nuit et jour. Patrouille de liaison avec la 3ème Cie et avec le régiment par violente tempête de neige.

Le 31 Mars après 12 heures de garde dans la tranchée nous recevons l’ordre d’attaquer Fey en Haye. Au moment du rassemblement de la Cie, le Capitaine me donne le commandement de la section en remplacement de Lebel. Au moment où le Capitaine donnait les ultimes recommandations à la 8ème 1⁄2 section chargée de flanquer la droite de la Cie, une slave d’obus arrive dans le groupe tuant net le Capitaine, un caporal et 5 hommes et décime la ½ section dont il ne restait qu’un caporal et 2 hommes. Manqué pour une entrée en matière.

 

Je rassemble la section qui se ressaisit bien et nous partons en avant. Beaucoup d’allant. Nous contournons et nous trouvons en avant du pays duquel nous travaillons toute la nuit à établir une ligne de tranchée. Une patrouille fouille le pays. Vers 24 h une fougasse Boche éclate à 20 m derrière ma section, nous recevons des pierres et Lemoine disparaît. Toutes les recherches restent vaines. Au jour le 1er Avril les Boches commencent à nous bombarder et bombardent le village qu’ils incendient complètement. Cela dure toute la journée pendant laquelle nous travaillons à renforcer notre tranchée. Nous touchons pour tout ravitaillement une 1⁄2 boule de pain et souffrons surtout de la soif.

La nuit suivante nous recherchons encore Lemoine et visitons enclos et maisons sans emporter d’armes. Nous ne trouvons rien sauf  plusieurs fils d’électricité et téléphone que nous coupons. A 4 heures du matin nous sommes relevés par le 138 Régiment et descendons à l’auberge Saint Pierre ou j’apprends la mort de Richez tué à la tête de sa section pendant une charge à la baïonnette. Perte de la section : 1 caporal et 5 hommes tuées 10 blessées et 1 disparu. Nous partons cantonner à Montauville et dans l’après midi je m’endors en lisant le journal. Nous sommes très bien reçus et nous nous refaisons un peu. Enterrements du capitaine et de Richez à Montauville.

 

Dimanche 4 Avril 1915

Le soir, nous mettons sac au dos et repartons pour le bois Le Prêtre. Il bruine et de 7h à 11h nous marchons dans les boyaux, véritable calvaire.

De 11h à 4h½ nous travaillons à la construction d’une tranchée à 75 m des Boches et malgré les obus nous rentrons sans blessés. Nous sommes de véritables blocs de boue du Képi aux souliers y compris sac et musette etc. En rentrant à Montauville nous nous couchons.

 

Lundi 5 Avril 1915

 

Repos. Alerte le soir, nous ne partons pas.

 

Mardi 6 Avril 1915

 

À Pont. Déjeuner propre, champagne et achats aux Remises.

 

Mercredi 7 Avril 1915

 

Repos à Montauville. 

Très bien reçu par Lieutenant à Montauville.

 

Jeudi 8 Avril 1914

 

Nous remontons aux bois Le Prêtre et pendant le trajet je reçois un éclat d’obus qui traverse ma capote et m’amoche le genou sans me blesser. Tranchées complètement bouleversées par les bombardements Boche et Français, blockhaus sautés, tas de cadavres. Pluie et de l’eau jusqu’aux genoux. Pas d’abri et nourriture très douteuse et rare  compensée par de nombreuses marmites grenades raquettes mines etc. C’est moche.

Vendredi 9 Avril 1915

 

Même situation. Le temps paraît long. Nous passons la nuit accroupie dans la tranchée sous la neige et la pluie. L’idée que nous sommes au feu nous réchauffe.
 

Les notes de guerre de Henri Colliot s’arrêtent au soir du 9 Avril 1915.

 

Samedi 10 Avril 1915 

Henri Colliot est grièvement blessé en entraînant ses hommes à l’assaut d’une tranchée ennemie sous un feu violent d’artillerie.

Le médecin diagnostique une blessure par balle à l’avant bras gauche.

 

Lundi 12 Avril 1915

Il reçoit une injection de sérum antitétanique.

 

Mardi 11 Mai 1915

En campagne, le général Lebocq commandant la division cite Henri Colliot à l’ordre de la division.

 

Extrait de l’ordre de la division numéro 344

169ème  Régiment d’infanterie

Colliot Jules Henri Sergent Mle 03551

«Ayant pris le commandement de la section à un moment critique a fait preuve d’énergie de courage et d’intelligence en conduisant vigoureusement ses hommes au combat et en accomplissant la mission confiée à son unité.»

Mercredi 9 Juin 1915 

Le Général Riberpray, commandant la 128 ème division, cite Henri Colliot à l’ordre de la division :

Extrait de l’ordre de la division numéro 43

169ème Régiment d’infanterie

Le Sergent Colliot Jules Henri Mle 03551, 8eme Cie

 

«Très bon sous-officier énergique et dévoué. Le 10 Avril 1915, a entraîné brillamment ses hommes à l’assaut d’une tranchée ennemie sous un feu violent d’artillerie; blessé grièvement.»

Screen Shot 2023-02-28 at 11.28_edited.jpg

Si vous avez des informations complémentaires sur les événements ou sur les soldats mentionnés ou si vous souhaitez simplement échanger sur le sujet vous pouvez nous contacter à l'email suivant:

emmanuel@colliot.com 

bottom of page